mardi 17 février 2009

Jacques Vergès se met en scène





Jacques Vergès se met en scène au Théâtre de la Madeleine, et à défaut de savoir si c'est une bonne chose, il est certain que cela a fait du bruit. Pour une inculte (et une réfractaire au droit) comme moi, Jacques Vergès, c'est l'avocat qui a défendu Klaus Barbie. Comme c'est un raccourci extrêment réducteur du personnage, il était temps de rémédier à cette lacune.

Lever du rideau, Jacques Vergès est assis derrière un bureau -qui je l'apprendrais en lisant Wikipédia est représentatif du personnage-, fumant un énorme cigare. Provocation assez inutile, qui a en plus le don de m'irriter (si j'ai envie de respirer l'odeur du cigare, je vais dans un bar pour friqués, pas au théâtre). Passons...

Le personnage est beaucoup moins impressionnant que dans mon imagination: assez petit, une veste de chasseur/pêcheur (ou assimilé), et pas particulièrement une grande présence sur scène. L'habit ne fait pas le moine certes, mais pour un acteur, la présence et le charisme sont majeurs. Or d'une part l'avocat en manque, d'autre part, son éloquence laisse clairement à désirer. Jacques Vergès donne l'impression d'un enfant ayant appris sa leçon et la récitant avec application. Un mot oublié suffit à lui faire perdre le fil de son discours, et de grossières fautes apparaissent (il arrive à confondre Jeanne d'Arc avec Antigone, non pas une fois mais deux fois!). Bref en récitation, son bulletin ne devait pas être des meilleurs en classe.

Le fond est plus important que la forme, certes, mais qu'on est avocat, et qu'on se veut acteur, d'autant plus pour un monologue, une telle prestation est choquante. Et pour enfoncer le clou, P. que j'accompagnais, s'est demandé s'il était atteint de sénilité, c'est pour dire...

La récitation n'est donc pas son point fort, en revanche son discours est extrêmement intéressant. Truffé de références, littéraires et politiques notamment, il établit un parallèle entre le théâtre et le procès. Il n'est pas le premier, et ne sera probablement pas le dernier. Plus l'heure avance, plus son discours se fluidifie, ce qui le rend plus agréable. Il y a même des pointes d'humour. Il évoque également ses expériences personnelles (de façon un peu orientée à mon goût, mais c'est mon côté mauvaise langue qui parle).

Jacques Vergès aurait fait un excellent professeur d'amphi. En tant qu'acteur, il est mauvais. En tant qu'homme, il doit être fascinant. Les masques ont été évoqués, et l'avocat indique que le masque de chaque homme ne tombe véritablement que lorsqu'on est entouré de deux gendarmes. Son propre masque n'est pas tombé, et il est véritablement difficile de savoir de quoi le personnage est fait: idéalisme, vanité, bonté, altruiste? Détesté ou adulé, l'homme suscite des réactons extrêmes. La mienne ne sera qu'une certaine méfiance, pour cette homme qui s'est fait applaudir sept fois (si, si j'ai compté) par un public conquis (des étudiants en première année de droit? en tout cas, un public assez peu exigeant) sans un sourire ou un merci.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

J'étais curieux de savoir à quoi ressemblait cette pièce... Tu m'as confirmé mes premières impressions. Si tu veux en découvrir un peu plus sur le personnage, il y a l'excellent documentaire de Schroeder "l'avocat de la terreur" entre fascination et écoeurement... Exactement comme dans ta pièce ;))

Anonyme a dit…

merci pour l'info! j'avais vaguement entendu parler du documentaire, mais ne savais pas que c'était sur Vergès!